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LETTRE À FRANCE

On t’a fait, par le passé, des déclarations de guerre.
On te remplit, chaque année, les déclarations d’impôt.
Aujourd’hui, je viens de faire ma déclaration d’amour.
En effet, j’aurais aimé n’être pas français
pour pouvoir te choisir Ô ma France.
C’est vrai que, vu de l’étranger,
tu n’es pas une contrée comme les autres…
Tout en contraste, pleine de nuances
capable du meilleur comme du pire.
Tu es le pays de la haute couture
et du bronzage Marcel,
le pays de la poularde aux morilles
et du triangle sandwich thon mayonnaise,
le pays des chocolatines ou bien des pains au chocolat.

Tu as donné au monde les Droits de l’homme
et tu obliges, dans le même temps, tes enfants
à conjuguer le plus-que-parfait du subjonctif.

Bref, le Gaulois, tombé dedans quand il était petit,
est forcément un être étrange, un peu bizarre,
qui commémore la Révolution, tous les 14 juillet ;
ou plutôt mieux ! à chaque apéro,
à coups de guillotine à saucisson ;
un gars fier d’avoir inventé le french kiss
tout en lui donnant un nom anglais.
Voyez en cela sa générosité et son pardon.

Alors oui ! le Français jamais à l’heure, toujours râleur,
te critique en permanence, telle est sa façon de t’aimer.
Mais c’est vrai, et j’y reviens,
que devant le prix d’un croque-monsieur
dans un de tes trains en retard
ou encore, confronté à un formulaire administratif
qui redemande pour la ixième fois notre date de naissance
comme si elle pouvait avoir changé ;
on se dit alors « Ben tiens, elle est belle la France ! »

Seulement, devant le parfum d’une boulangerie un matin d’hiver,
la santé gratuite pour tous, devant une finale du Mondial, devant ta cuisine gastronomie ancestrale,
devant tes sites classés à l’Unesco,
on s’écrie aussitôt « Ben voilà : c’est ça la France ! »

De fait, comme nous, les Français, on est timide,
on n’ose pas te le dire,
mais cette façon dont tu maries l’inutile au sublime,
sans jamais te prendre au sérieux,
c’est ça qui te rend belle à nos yeux
et c’est pour ça qu’on t’aime.

Aimer la France, c’est écouter France Gall à Paris en bagnole
c’est écouter le chant des cigales au pays de Pagnol
c’est ta Corse en montagne, les vins de bordeaux
et le bœuf bourguignon
ce sont les fest-noz en Bretagne et le pont d’Avignon ;
Et bien sûr, c’est ta langue partagée par-delà les frontières
où de Québec à Alger, on peut aimer… ses airs.

Douce, comme au réveil, un pot de confiture,
France, vrai Père Noël, qui ne serait pas une ordure,
tu veilles à apporter de manière équitable
la joie au Petit Prince autant qu’aux Misérables.

Chacun, sous ton regard, dors sur ses deux oreilles
puisque par Nuit et Brouillard… Simone Veil.

Oui, j’aime tant ton élégance et ta nature,
que je courrais, ma France, toutes tes préfectures,
s’il le fallait, pour trouver le formulaire à jour
sur lequel je pourrais te déclarer mon amour.

(Bill François, lauréat du Concours d’Eloquence 2019, humoriste, écrivain, orateur, poète, normalien, docteur en Physique.)
Texte de Bill François – reconsidéré par Thierry LEFEBVRE en vue du CMC juin 2022

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